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Les vagues gazeuses dérivantes,
Etudes françaises.
Les premières recherches concernant
ce mode de dissémination furent débutées le 1er mai 1915 et les premiers essais de production de
vague gazeuse eurent lieu dès le 4 mai 1915. Ils se poursuivirent tout au
long du conflit. Ces travaux furent conduits sous la direction des capitaines
Bied-Charreton et Beccat. Ils nécessitèrent la participation de nombreux
chimistes, comme Delépine, Urbain, et Kling.
Après une première période de
recherches et d'essais, il fut convenu que le chlore était le gaz le plus
indiqué pour la formation de vague. Successivement, il fut envisagé l'emploi
du chlore liquide évacué à l'état de gaz ou gazéifié à la sortie du tube
; chlore combiné au souffre et au charbon dans des fourneaux ; chlore
incorporé à des fumées de naphtalines ou d'huiles d'anthracène ; chlore
combiné à l'acide chromique en dissolution et chauffé ; chlore réagissant
sur une solution de phosphore dans le sulfure de carbone ; chlore barbotant dans
des bacs contenant du souffre en fusion ; chlore combiné au sulfure de carbone,
vaporisé dans des fourneaux spéciaux : essais de différents types de
fourneaux à coke ; essais de fourneaux à brûleurs à liquides. Parallèlement,
on étudiait l'emploi des vapeurs nitreuses par un procédé basé sur la
réaction de l'acide sulfurique sur un mélange de nitrate de soude, pyrite de
fer, réaction qui donne du chlore et des vapeurs nitreuses. Une certaine
quantité de chlorosulfure de carbone, introduite dans le mélange, était en
outre vaporisée par la chaleur dégagée par la réaction qui était effectuée
dans des bacs.
Les premières expérimentations de
toxicité furent pratiquées sur des animaux, des chiens dans un premier temps.
Les essais demandèrent des concentrations de chlore extrêmement importantes
pour obtenir la mort de l'animal, très souvent supérieures à 6g/m3. On s'aperçut
que l'homme présentait une sensibilité particulière au chlore, et que des
concentrations plus faibles étaient létales. L'utilisation de nombreux
produits fut envisagée et leur utilisation fut comparée à celle du chlore,
mais aucun ne fut reconnu supérieur.
De nombreux essais furent entrepris
pour déterminer les propriétés du mélange chlore-phosgène, notamment après
la demande du Général commandant en chef du 18 décembre 1915, visant à
"prendre des dispositions pour qu'à l'avenir la Collongite entre dans
la proportion de 10% dans les envois aux armées pour la formation des vagues"
. Ces travaux
remarquables permirent de fixer de façon précise, dès janvier 1916, les
conditions d'utilisation de ce mélange, notamment grâce aux études du
professeur Lebeau . Ainsi, on pu déterminer que la
concentration maximale en phosgène dans les bouteilles destinées à
l'émission ne pouvait pas dépasser certaines valeurs ; une proportion minimale
de 56% de chlore en volume était nécessaire. Au point de vue chimique, les
mélanges les plus riches en chlore étaient ceux qui attaquaient le moins le
métal mou des robinets des bouteilles. En dessous de ces valeurs en chlore, des
cristaux se formaient fréquemment et bouchaient les robinets des bouteilles. La vitesse de
vidange était d'autant plus grande que la teneur en chlore était
importante. Des essais montrèrent que l'utilisation de phosgène pure ne
donnait pas lieu à la vaporisation correcte du gaz, mais à la projection de
liquide à la sortie des bouteilles avec une émission de gaz insignifiante. Au
delà de 50% de phosgène, la durée de vidange des bouteilles était
extrêmement ralentie et incomplète, surtout à température basse (en dessous
de 20°C). Plus le mélange était riche en phosgène, plus l'émission donnait
lieu à une projection de liquide à la sortie des tuyaux d'émission,
préjudiciable à la bonne vaporisation du mélange gazeux.
Les français adoptèrent le ratio de 25% de phosgène pour 75 % de
chlore, avec parfois près de 5kg d'opacite ajouté au mélange. Rappelons
également que le phosgène n'est gazeux qu'au dessus de 8°C et que son
utilisation pure en bouteille est absolument inenvisageable aux faibles
températures. Les bouteilles ne se vidangent pas et si l'on chasse leur contenu
par de l'air comprimé, le phosgène ne se vaporise pas. Le chlore est le
vecteur de la vague, il entraîne avec lui le phosgène.
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Sapeur Z chargé du maniement d'un cylindre de gaz du type
moyen, au camp de Satory. |
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Voici le résumé de quelques essais
qui permirent de déterminer les conditions les plus favorables aux émissions
:
Expérience du 6 juillet 1915 :
Vague opaque à 16h53, vent de
3,2m/s. On ouvre une bouteille de chlore + chlorure d'étain. La vague est très
dense, sa dispersion à 150m ne dépasse pas 12m en hauteur. Avec un appareil
Draeger et des lunettes, on tient très bien au centre du nuage à une vingtaine
de m du point d'émission ; seul un léger picotement des yeux gêne
l'observateur.
Vague transparente à 17h03, mélange
chlore + chlorosulfure. A 170m, l'agressivité est telle qu'on ne peut pas tenir
à 170m. L'emploi du masque et du baillon est nettement insuffisant pour tenir
quelques instants.
Expérience du 8 juillet 1915
(prélèvements et analyses par Delépine et son collaborateur, Monsieur Douris) :
3 bouteilles sont placées tous les
20 mètres. La première est ouverte à 16h17, la deuxième 6 minutes 15 après
et la troisième 2 minutes 30 après.
|
Chlore + chlorure stannique en
g/m3 |
Chlore + chlorosulfure en g/m3 |
Distance |
|
|
|
|
50 m |
0.17 |
0.42 |
0.54 |
0.76 |
100 m |
0.17 |
0.25 |
0.12 |
0.42 |
Tranchée à 175 m |
0.17 |
0.17 |
0.17 |
0.33 |
250 |
0.17 |
0.14 |
0.09 |
0.17 |
350 |
0.17 |
0.09 |
|
0.33 |
Dans la vague chlore + chlorure
d'étain, les expérimentateurs ne tiennent que quelques instants avec l'aide
d'un baillon. Le chlorure d'étain . A 500m, il est impossible de tenir plus de
quelques secondes sans protection. A plus de 2km, l'effet du gaz était encore
extrêmement gênant.
Un lapin placé à 100m du point
d'émission présente dès l'arrivée du nuage une respiration très saccadée,
puis un arrêt respiratoire et des signes de suffocation. Après le passage de
la vague, sa respiration redevient normale. Un autre lapin convulse rapidement
et décède dans les dix minutes.
Expérience du 14 janvier 1616
à 15h20. Vague chlore + opacite et
chlore + clairsite
Température : 5,4, humidité 61,
vent : 2,1 à 1,1
10 bouteilles de 33l vidées,
placées de 3m en 3m, durée moyenne d'évacuation : 10m30. dB : 1,33kg/m/min
50m |
0,4 |
100m |
0,25 |
200m |
0,09 |
300m |
0,09 |
400m |
0,07 |
|
|
à 15h42. Vague chlore + opacite +
phosgène
Température : 4,5 humidité 70, vent
: 1,4 à 1,7
8 bouteilles de 33l vidées, placées
de 3m en 3m, durée moyenne d'évacuation : 10m05. dB : 1,25kg/m/min
Teneur en chlore en mg/m3
Expérience du 19 janvier à 15h. Vague chlore +
opacite
Température : 7,2, humidité 79,
vent : 5
5 bouteilles de 22l vidées et 5 de
10l, placées de 3m en 3m, dB : 0,95kg/m/min
50 m au ras du sol |
0,29 |
50 m hauteur du visage |
0,43 |
100m hauteur de poitrine |
0,15 |
200m hauteur de poitrine |
0,05 |
Mr
Lebeau rappel qu'il avait effectué un dosage dans une tranchée située à
quelques mètres des bouteilles pour trouver un résultat moyen de 0,7 g/m3.
Expérience sur
les
vagues chlore + phosgène.
Toutes les
bouteilles sont chargées en mélange binaire chlore+phosgène (75/25)
Expérience du 19
mars :
Température : 0,
humidité 50, vent : 0,5
2 bouteilles
distantes de 10 m. Soit 2g/m/s
Données exprimées
en chlore total (dosage après prélèvement par ampoules de 1,08 litres, trois prélèvements
à chaque poste)
30 m |
0,4 |
50 m |
1,09 |
100 m |
0,35 |
200 m |
0,32 |
Données
comparatives :
|
Vague chlore + opacite du 23 février |
Vague chlore phosgène du 19 mars |
Densité d'émission par mètre de front à
50 m du point d'émission |
3g/s |
2g/s |
Vitesse du vent |
1m/s |
0,5 à 1m/s |
Chlore total à 20m |
2,9g/m3 |
|
50m |
0,84 |
1,9 |
100m |
0,032 |
0,35 |
200m |
0,030 |
0,32 |
Expérience du 29 mars :
Température : 3,9,
humidité 64, vent : 2,3 à 1,70
7 bouteilles
partagées en 3 postes : un de 3 et deux de 2, espacés de 20m (près de
5g/m/s).
Première période
de 17h15 à 17h26 ; deux prélèvements consécutifs de 5 minutes sont faits
avec l'appareil à prélèvement continu de Delépine, à 70 m du front
d'émission, au font d'une tranchée.
Seconde
période, de 17h30 à 17h36 ; on a dosé le chlore libre à la surface du sol au
même endroit, sur un prélèvement de 5 minutes.
La vitesse du vent
a baissée, de 2,30 jusqu'à 1,5m/s ; la vague qui avait un aspect alors
uniforme et transparent, est devenue opaque et verdâtre sur une hauteur de
près d'un mètre, jusqu'à 70 à 80 mètres du front. Cela correspond à
une élévation très sérieuse de la concentration en chlore libre (1,87 à
fleur de sol au lieu de 0,7 au fond de la tranchée).
Teneur en chlore libre en g/m3 |
Vitesse du vent en m/s |
5 premières minutes au fond de la tranchée
: 0,7 de chlore libre |
2,30 |
5 dernières minutes au fond de la tranchée
: 0,61 de chlore totale (faible teneur due à un remous de la vague) |
2,30 |
Deuxième période : à fleur de sol : 1,87
de chlore libre |
1,70 à 1,5 |
Ce changement
léger de la vitesse du vent donne un concentration de chlore jusqu'à près de
trois fois supérieure à celui du début de l'émission. Cette expérience met
ainsi en exergue l'importance primordiale de la vitesse du vent sur la
concentration de la vague.
La vidange de ces
bouteilles a été très irrégulière : de 2 à 3,55 kg/min. L'examen des tubes
plongeurs de ces bouteilles fait ultérieurement, montrera un dépôt de
chlorure ferreux, dus à une dessiccation insuffisante des bouteilles avant
chargement.
Expérience du 9
avril :
Par vent de 3 à
3,5 m, le but de l'essai était de faire des dosages de Chlore libre et de
chlore total à des distances entre 30 et 300m.
On utilisa quinze
bouteilles répartis en groupe de 3 sur cinq postes, distant de 20 mètres, soit
80 mètre de front. Deux vagues successives ont été émises. A 50 mètres, le
débit est de 7g/m.
Première vague :
Température : 14,
humidité 41, vent : 3 à 3,5
A 125 m, dosage par ampoules |
|
Tranchée : chlore libre |
0,21 |
Parapet : chlore libre |
0,104 |
Parapet : chlore total |
0,106 |
Deuxième vague :
Température : 14,
humidité 43, vent : 2,6 à 2
Dosage par appareils à prélèvement continu |
Chlore libre g/m3 |
Chlore total g/m3 |
Tranchée à 50 m |
1,62 |
|
Tranchée à 50 m |
|
1,74 |
Sol à 200m |
0,026 |
|
Sol à 300m |
|
0,018 |
Sol à 300m |
|
0,2 |
Dosage par ampoule |
Chlore total |
Parapet à 50 m |
5,33 |
Parapet à 50 m |
3,7 |
Parapet à 125 m |
0,2 |
Tranchée à 125 m |
0,15 |
Hauteur d'homme à 200m |
0,04 |
Ces données
confirmes que la vague s'est fortement dispersée avant 200m.
Pour la suite des
calculs, on admit que la teneur en phosgène, fut égale à la différence entre
le chlore libre et le chlore total, malgré la transformation d'une faible
proportion de chlore libre en HCl à l'air libre (ces données seront validées
ultérieurement lors de nouveaux dosages).
|
Prélèvement continu |
Prélèvement par ampoules |
|
Chlore |
Phosgène |
Chlore libre/Total |
Chlore |
Phosgène |
50 m au sol |
|
|
|
4,55 |
0,46 |
50 m tranchée |
1,62 |
0,167 |
0,91 |
|
|
125 m sol |
0,104 |
0,0172 |
0,59 |
0,118 |
0,082 |
125 m tranchée |
0,21 |
0,45 |
|
0,094 |
0,056 |
300 m sol |
0,026 |
|
|
0,012 |
0,028 |
300 m tranchée |
0,018 |
0,253 |
0,066 |
|
|
Le rapport
phosgène/chlore, par vent faible, augmente considérablement tout au long de la
progression de la vague. La densité du phosgène étant plus élevée, il
diffuse moins en hauteur que le chlore et colle plus au sol.
Expérience du 20
avril :
Elle avait pour but
de reproduire les essais précédant, mais par vent fort.
Deux séries de
prélèvements furent effectués : première série avec appareil à
prélèvement continu de Delépine pour mesurer le chlore libre ; la deuxième
avec appareil de Kling à prélèvement continu permettant de mesurer le chlore
libre et le phosgène directement.
Le professeur
Lebeau s'est placé directement dans la vague à différents points pour
apprécier la possibilité de tenir sans masque dans celle-ci.
L'émission a été
prolongée sur une durée de 23 minutes, en remplaçant les bouteilles vides par
une pleine, au fur et à mesure de la vidange. Le débit fut de 7,6g/m/s. Température :
10,
humidité 45, vent : de 6 à 8 m/s
Résultats de Mr
Kling et Delépine
|
Chlore |
Phosgène |
Chlore total |
50 m |
0,163 |
0,054 |
0,22 |
125 m |
0,94 |
0,031 |
0,15 |
200 m |
0,045 |
0,015 |
0,082 |
300 m |
0,040 |
0,012 |
0,057 |
A 300 m, Le
professeur Lebeau, en soulevant son masque, a perçu l'odeur du chlore mais pas
celle du phosgène. A 600m, il estime qu'il aurait pu tenir la durée de la
vague, l'odeur n'étant que peu perceptible.
On constate que par
vent au delà de 6m, les teneurs chlore et phosgène ne sont plus toxiques au
delà de 200m, que la proportion chlore/phosgène reste constante dans la
progression de la vague (la teneur en phosgène comparée au chlore augmentait
dans une vague par vent de 2 à 3m).
Une nouvelle série
de mesures fut entrepris pour déterminer les conditions d'émission les plus
favorables.
Lors de ces
nouveaux essais, le front d'émission fut à chaque fois identique, d'une
longueur de 100 mètres, et constitué de 5 postes distants de 20 mètres.
Expérience du
1er mai 1916 :
Vague
chlore-phosgène-opacite, 3 bouteilles de 33l par poste, chaque bouteille
reliée à une lance d'émission individuelle, située à 1,50m du sol. La vague
dure 10 minutes.
Température : 16,
humidité 60, vent : 1,30 à 0,6. Le poids émis par seconde et mètre de front
est de 9g. Le temps est couvert, le vent est absolument régulier en vitesse et
en direction ; la vague garde une cohésion parfaite.
|
Chlore total en g/m3 |
50 m |
4,27 |
130 m |
1,15 |
200 m |
0,59 |
245 m |
0,61 |
245 m au fond d'un abris |
0,45 |
Expérience du 9
mai 1916 :
Vague
chlore-phosgène-opacite, 6 bouteilles de 33l par poste, accouplées par
tuyauterie métallique à 6 branches et se vidant par une seule lance
d'émission, située à 0,15 m du sol. La vague dure 10 minutes.
Température : 21,
humidité 40, vent : 2,5 à 6. Soleil assez fort. Le poids émis par
seconde et mètre de front est de 21,4g, la valeur la plus forte obtenue jusque
là. Le vent fort rendra la vague peu homogène.
|
Chlore total en g/m3 |
50 m |
2,41 |
100 m |
0,55 |
140 m |
0,88 |
175 m |
0,52 |
280 m |
0,12 |
Malgré une
intensité d'émission 2,4 fois plus élevée que celle du 1er mai, les valeurs
en concentration sont nettement inférieurs à celles du 1er mai. Ces
différences sont corrélatives aux différences de conditions
météorologiques.
L'influence des
conditions atmosphériques sur la teneur nocive des vagues domine donc nettement
celle de l'intensité de l'émission. Ce point est absolument fondamental et fut
découvert lors de cette journée.
Expérience du
17 juin :
Deux vague successives
chlore-opacite. Première : 3 bouteilles de 33l par poste, accouplées par
tuyauterie métallique à 3 branches et se vidant par une seule lance
d'émission, située à 0,15 m du sol. Deuxième : 6 bouteilles de 33l par
poste, accouplées par tuyauterie métallique à 6 branches et se vidant par une
seule lance d'émission, située à 0,15 m du sol.
Température : 12,
humidité 45, vent : 4. Soleil faible. Vent de direction variable . Le poids
émis par seconde et mètre de front est de 8,6g pour la première vague et de
21,7g/s/m pour la deuxième. Le vent irrégulier rendra la vague peu homogène.
|
Chlore libre en g/m3 |
|
première vague |
deuxième vague |
50 m |
0,6 |
2,36 |
92 m |
0,18 |
0,16 |
125 m |
0,07 |
0,28 |
175 m |
0,062 |
0,20 |
250 m |
0,027 |
0,08 |
L'intensité
d'émission de la 2iem vague a été 2,52 fois plus forte que la première,
alors que le nombre de bouteilles par poste était seulement double. Cette
supériorité de débit est le résultat de la forme plus favorable donnée à
la tuyauterie d'accouplement de 6 bouteilles par rapport à 3. Il correspond à
un débit de 26,1 kg/m par groupe de 6 bouteilles accouplées. Comparé au
débit d'émission obtenu en abris profond aux mêmes températures (15,06 kg),
on constate que l'émission en abris profond réduit considérablement le
débit.
Les teneurs aux
différentes distances ont été 3 à 4 fois plus fortes dans la deuxième vague
que dans la première, pour une intensité d'émission seulement 2,52 fois plus
forte. Et comparée à la vague du 1er mai, la deuxième vague du 17 juin
malgré une intensité d'émission 2,4 fois plus forte, a donné des valeurs 2
à 5 fois plus faibles.
Les conclusions
de cette série d'essais sont les suivantes :
Il y a un avantage
sérieux, au point de vue des valeurs nocives, à opérer par vent aussi faible
et régulier que possible, à opérer en l'absence de soleil (temps couvert ou
de nuit). L'émission en abris profonds par groupes de bouteilles accouplées en
série réduit l'intensité du débit dans un rapport qui peut atteindre 40%.
Les tuyauteries d'accouplement à 6 bouteilles donnent un débit par bouteille
supérieur à celles d'accouplement à 3 bouteilles.
Les concentrations
nocives obtenues sont essentiellement fonction des conditions atmosphériques.
Elles dominent très nettement celles de l'intensité de l'émission. Une
opération par vague gazeuse ne peut être réussit que si différents facteurs
sont réunis. L'essentiel est la vitesse et la constance du vent. Vient ensuite
les phénomènes de convection qui résultent essentiellement de la chaleur
diffusée par les rayons du soleil. Enfin, le débit de gaz obtenue à la sortie
des bouteilles.
D'une façon plus
générale :
Les
considérations faites sur le tonnage d'agent chimique mis en oeuvre n'ont
aucun intérêt et ne permettent pas de comparer les vagues entre elles.
Une vague émise dans des conditions parfaites permet parfois d'obtenir
des concentrations nocives bien plus élevée (parfois plus de dix fois)
qu'une autre vague émise dans des conditions moins bonnes, même si son
débit est trois à quatre fois supérieur.
Ces
conclusions obtenues par la pertinences des expériences et des essais des
services chimiques français, les services chimiques allemands ne les
maîtrisaient absolument pas. La qualité des informations recueillis par
leurs services météorologiques était bien moindre. Il semble que la préoccupation
première des unités allemandes mettant en oeuvre les opérations
chimiques par vague, était essentiellement d'éviter les changements de
direction du vent pour éviter le retour du gaz toxique vers leurs lignes.
Les vents faibles étaient recherchés, mais ils exposaient plus fréquemment
à des changements de direction. Ainsi, les pionniers allemands
n'hésitaient pas à lâcher le contenu de leurs cylindres dans des vents
inconstants de vitesse importante, de l'ordre de 5 m/s. Celles qui furent
libérées par vent faible et constant, de l'ordre de 1 à 2 m/s,
permirent d'obtenir des concentrations de toxiques notables et surtout des
effets à plusieurs dizaines de kilomètre en arrière des lignes.
Aux vues de
ces résultats et en les comparant aux capacités des appareils de
protection utilisés de 1915 à 1918, il est frappant de constater
l'efficacité de la protection apportée par ces derniers, malgré une
apparente simplicité. Aucune vague ne fut en mesure d'épuiser leurs
capacités de filtration, même pour les plus médiocres d'entre eux (essentiellement
les appareils allemands avant l'arrivée des cartouches 11/11 deuxième
type en décembre 1916). Par ailleurs, ce but ne fut jamais recherché par
aucun belligérant, contrairement à ce que de nombreuses sources
avancent.
Une
opération par vague permettait d'obtenir des résultats (en terme du
nombre d'intoxiqués obtenus chez l'ennemi) que d'une seule façon : en
surprenant les combattants sans masque. De nombreuses tactiques furent
imaginées dans ce but. L'étude des facteurs conduisant aux intoxications
chez les combattants français dans les opérations menées par les
troupes chimiques allemandes (de 1916 à 1917) illustre parfaitement ces
considérations. Les intoxiqués se comptent essentiellement parmi ceux
qui ne purent mettre leur masque à temps (pour diverses raisons).
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