Ce site a pour vocation de présenter l'Histoire de l'arme chimique au cours de la Première Guerre Mondiale et jusqu'aux années 1940.
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L'ensemble de ce qui y est publié est issu d'un long travail de recherche et de synthèse.
L’utilisation de l’arme chimique durant la Première Guerre mondiale est l’un des évènements les plus marquant de ce conflit ; elle est même devenue le plus sombre symbole qui caractérise l’horreur de cette guerre totale.
C’est également l’un des aspects le plus méconnu de cette période. Les études, travaux et les publications à son propos sont peu courants et, hormis quelques excellentes recherches récentes (les travaux d'Olivier Lepick sont une référence depuis leur publication), force est de constater que nombre d’entre eux accumulent les imprécisions voir les erreurs historiques.
En définitive, on peut dire que jusqu’à ces dernières années, on ne connaissait presque rien sur cet aspect de la Première Guerre mondiale, alors que l’utilisation de l’arme chimique est omniprésente dans la majorité des ouvrages traitant du Premier conflit mondial.
Ci-dessus, huile sur toile de John Singer Sargent, Gassed, 1918. En 1918, Sargent est chargé de réaliser une grande peinture patriotique pour un projet de Hall of remembrance montrant « la fusion des forces britanniques et américaines ». À la recherche d’un sujet digne, Sargent voyage en France en juillet 1918 et rejoint la Guard Division près d’Arras. Parmi les scènes qui l’impressionnent le plus, celle d’un champ de bataille rempli d’hommes victimes des gaz et aveugles (en réalité, victimes de l'Ypérite un liquide vésicant). Le tableau montre les conséquences d’une attaque au gaz moutarde. On peut y voir la souffrance des hommes, que la grande taille du tableau rend d’autant plus saisissante.
Troublant constat... Alors que l'on vient de célébrer le centenaire de la Grande Guerre, alors que l'Organisation pour l'interdiction des Armes Chimiques se voit décerner le prix Nobel de la paix, que sait-on au juste sur cette guerre chimique, sinon pas grand chose? Que sait-on sur l'histoire du développement de cette arme à la si sombre réputation, sinon quasiment rien ?
A l'évidence, il existe un malaise ou plutôt un tabou, entourant cet aspect qui fait pourtant intégralement partie de notre Histoire.
Depuis le début de ces travaux, je ne cesse d'être surpris par la discordance qu'il existe entre une histoire "officielle", celle des manuels d'histoire, et l'histoire, la vraie cette fois-ci, tirée des sources officielles. J'en fis même l'objet de l'introduction de mon travail universitaire. Je me souviens de mes premiers travaux de recherche à partir d'archives qui évoquaient un programme chimique français des années 1920 aux années 1940, et de la surprise que cela suscitait quand j'évoquait cette "découverte". Personne n'avait connaissance de cette partie de notre histoire, personne ne soupçonnait son importance et quel retentissement cela avait eu jusqu'à notre époque. Après les travaux précurseurs de mon ami Régis Maucolot (Les pharmaciens dans la Guerre des gaz, Prix du meilleur travail historique sur le Service de Santé des armées, Prix Paul-Louis Drouet de l'Académie de Stanislas de Nancy, Prix de la pharmacie militaire de l'Académie nationale de Pharmacie), la soutenance de ma thèse récompensée par le prix de d'Histoire de l''Académie nationale de pharmacie, les premières pages de ce site étaient publiées dès 2001. Depuis, elles ne cessent d'être complétées.
Pour citer quelques exemples :
Vous pourrez apprendre à la lecture de ces pages, que la guerre chimique ne fut pas initiée par l'Allemagne, mais bien par la France (Introduction).
Vous pourrez d'ailleurs découvrir une partie des recherches françaises menées sur l'arme chimique, avant le Premier Conflit mondial (Introduction).
Vous pourrez constater que l'intérêt du développement de l'arme chimique pendant le conflit, répond autant à un objectif militaire qu'à un objectif industriel et commercial (section Industrie). Comment le lobbying de l'industrie chimique allemande réussit à s'imposer au centre de la stratégie économique et militaire du pays (1914-1918 Prélude à la guerre chimique).
Vous pourrez constater l'extraordinaire difficulté de réalisation des opérations chimiques par vagues et leur ampleur (Les vagues).
Vous allez pouvoir noter que plusieurs tentatives d'utilisation de munitions chimiques furent effectuées avant la date du 22 avril 1915, retenue comme étant celle du début des hostilités chimiques (Artillerie - Munitions chimiques allemandes 1915).
Vous constaterez que les premières opérations chimiques françaises et les premiers tirs chimiques eurent lieu dès juillet 1915 (Artillerie française - Substances), que contrairement aux autorités allemandes, les autorités françaises décidèrent d'introduire dès 1915 des munitions aux capacités exclusivement létales, avant de faire marche arrière de peur de représailles (Artillerie française - Munitions).
Que l'impacte de l'arme chimique et particulièrement les pertes liées à son utilisation restent très difficile à cerner précisément (Pertes).
Vous pourrez souligner qu'à partir de la fin de la Première Guerre mondiale, le secret entourant l'arme chimique et son développement fut porté à un plus haut point et qu'il le reste encore aujourd'hui. Ainsi, tous les aspects du développement chimique depuis 1919 restent quasiment inconnus.
Saviez-vous que la France mena depuis cette période des travaux offensifs de façon quasiment continue et qu'elle pris une avance considérable dans ce domaine, qu'elle mis sur pied un programme industriel qui lui permit de devenir la nation la mieux préparée à un conflit chimique, qu'elle constitua un stock de munitions chimiques considérable à la veille de la Deuxième Guerre mondiale, qu'une crise à l'hivers 1939 fit craindre l'utilisation d'un toxique de guerre par les armées allemande contre lequel les armées françaises n'étaient pas protégées... (1920 - 1940).
Au delà de ces discordances, il faut également s'interroger sur l'inexplicable pauvreté des archives françaises sur certains points de la guerre chimique. Je ne fut pas le seul à le remarquer ; Olivier Lepick dans son ouvrage La Grande Guerre Chimique, 1914-1918, le signale à de nombreuses occasions. Et finalement, tous ceux qui ont étudiés cet aspect si emblématique de la Grande Guerre en arrive à ce constat : il manque des pièces majeures à l'inventaire des archives françaises. On arrive par ailleurs rapidement à une double observation, les pièces manquantes correspondent aux points méconnus de cette histoire. A priori, rien d'exceptionnel à cela. Mais au delà de ce lien de causalité, on perçoit une volonté délibérée de faire disparaître certains "détails" de l'histoire, des détails qui n'en sont pas en réalité.
On peut tenter de cerner quelques-unes de ces "erreurs historiques" en les répertoriant ainsi :
- Il n'est jamais fait mention des études menées avant la Première Guerre mondiale sur les possibilité de détourner les interdictions des Conventions internationales prohibant les armes chimiques. Les archives du Service Historique de la Défense, de loin la source la plus importante dans le domaine, sont quasiment vierges de pièces en rapport à ces études.
- Les armées françaises disposaient de projectiles chimiques dès le début de la campagne et ont utilisées l'arme chimique au début du conflit, initiant progressivement une escalade de moyens conduisant probablement à l'épisode du 22 avril 1915 (considéré à tort comme la première utilisation de l'arme chimique). Les autorités françaises s'en défendirent en avançant l'absence de nocivité des substances employées à cette époque et en renvoyant la responsabilité à l'Allemagne. En réalité, ces substances françaises étaient bien plus toxiques que le chlore employé sur le saillant d'Ypres, ce 22 avril 1915. Elles furent surtout peu efficaces car employées de façon inopportune. Mais la responsabilité de l'avènement de la Guerre chimique ne peut en aucun cas être attribuée à l'Allemagne seule.
- Etrangement, on note une absence (relative mais surtout inexplicable) de documents permettant de fixer la date des premiers tirs d'obus chimiques létaux (ou supposés l'être) français. Les tirs chimiques de juillet 1915, puis les tirs des obus n°5 sont absents des documents des archives, pourtant extrêmement prolixes sur cette période ( Artillerie française - Substances). Et forcément, l'Histoire n'a pas retenue ces incontestables premières violation des Conventions internationales par les armées françaises.
- En général, tous les aspects offensifs de l'utilisation de l'arme chimique par les armées françaises, sont extrêmement mal représentés dans l'immense quantité de documents conservés aux archives du Service Historique de la Défense. Olivier Lepick le remarque également ; extrême pauvreté de documents sur les attaques chimiques françaises par vagues gazeuses dérivantes tout comme par bombardements chimiques (par artillerie ou par projectors). Troublant constat : on connaît bien mieux l'aspect offensif (qu'il soit technique, tactique, stratégique) utilisé par les armées allemandes, alors que leurs archives ont quasiment disparues dans un incendie en 1945, bien avant qu'elles soient consultables !
- L'arme chimique n'a fait que peu de victimes, en comparaison aux moyens "conventionnels" utilisés pendant le Premier Conflit Mondial. Par ailleurs, son utilisation reste pratiquement anecdotique dans le cadre des immenses opérations menées tout au long du conflit par les belligérants. L'artillerie chimique ne permit d'obtenir des résultats tactiques qu'à partir de l'année 1918, voir de l'été 1918 pour les armées alliées, quand elle devint omniprésente dans toutes les actions. On devrait ainsi noter une multiplication des rapports, des notes et des travaux français dans cette période, hors ces documents brillent surtout par leur inexplicable absence. Et pourtant !On connaît les abondantes études sur les opérations chimiques militaires menées par les armées US, au travers des études enseignées par l'US Army Chemical Corps Historical Office. Ces études, menées de façon extrêmement précises, permettent de fixer l'efficacité des bombardements chimiques devant les bombardements conventionnels. En notant que ces opérations étaient menées avec la collaboration des Services chimiques français. L'absence de ces documents des archives française permit de construire toutes les théories les plus absurdes sur l'efficacité de l'arme chimique, des plus effrayantes dans les années 1930 jusqu'à l'absence d'efficacité parfois avancée de nos jours. On pourra consulter la page "Perte" pour appréhender de plus près ces incohérences.
- Enfin, pour couper court dans cette liste, citons simplement l'absence quasiment complète de documents sur la période 1919 à 1940. Un long travail de recherches permettant l'exhumation de rapports "oubliés" permet en partie de compléter l'inexplicable pauvreté des archives recensées au Service Historique de la Défense (voir : 1920 - 1940). Encore une fois, la discordance entre la réalité historique retrouvée au sein de ces documents est édifiante en comparaison à l"histoire officielle", quand elle existe.
Nous proposons donc de mettre en ligne un maximum d’informations sur cet aspect si particulier et si méconnu du conflit, pour permettre à chacun de cerner plus précisément ce que fut l’arme chimique durant cette période.
Nous venons d’en parler ; les sources fiables et exhaustives sur la guerre chimique pendant le Premier Conflit mondial sont l’exception. Pour l’essentiel, nous nous sommes limité aux archives officielles du Service Historique de l’Armée de Terre et à quelques documents historiques, analysés avec rigueur et de façon critique. S’il s’agit d’autres sources, elles sont alors citées.
La première partie de ce travail fut de préciser le rôle joué par les pharmaciens dans les recherches menées par la France pour mettre au point puis pour perfectionner les appareils de protection contre « les gaz ». Le sujet était suffisamment vaste et interdisait toute digression vers d’autres aspects de la guerre chimique, sous peine de ne jamais finir ce travail universitaire. Il décrit de façon chronologique les études et recherches menées par les Services chimiques français dans le domaine de la protection individuelle. Le domaine de l’agression est évoqué, principalement dans ses évolutions durant l’année 1915 et 1916. Ce travail, réalisé en quelques années, comporte encore des inexactitudes ; elles ont été modifiée pour l'essentiel.
Les recherches menées par les pharmaciens ne se sont pas bornées au domaine de la chimie pure et de l'arme chimique.
Différentes Commissions furent chargées de la mise au point d'appareils destinés au lancement de liquides enflammés, alias lance-flamme, dont nombre des membres étaient pharmaciens. Leur implication dans les recherches ayant attrait à la Défense Nationale fut saluée par la transformation des Ecoles de pharmacie en Université. Les forces vivent des Services Chimiques français comptèrent seulement 110 chimistes de très haut niveau, qui réussirent le tour de force de prendre le dessus, dans les domaines de l'agression et de la protection, face à la toute puissante industrie chimique allemande. Plus de la moitié de ces chercheurs étaient pharmaciens.
La partie "Masques" du site reprend en partie, mais de façon descriptive et simplifiée ce travail.
Lors de ces recherches, la quantité d’informations recueillies était si importante qu’il fallut occulter de nombreux points pour ne retenir que l’essentiel. Ces informations ont étéprogressivement ajoutées au contenu de ce site (on peut par exemple découvrir la partie consacrée aux Masques allemands, bien plus conséquente qu’auparavant).
L’utilisation des agressifs chimiques n’avait pratiquement pas été abordée dans ce travail universitaire. Pourtant, au fil des recherches, je me suis passionné pour cet aspect et j’ai relevé et étudié de nombreuses sources inédites avec l’intention de les utiliser ultérieurement. Il fut cependant nécessaire de poursuivre ces recherches après la soutenance de thèse, ce qui explique l’absence de l’utilisation de nombreuses sources dans le travail d’origine.
Aujourd’hui, il reste encore à synthétiser plusieurs de ces informations ; mais beaucoups sont déjà publiées sur le site.
La partie proposant un descriptif sur les principales substances utilisées « Les Gaz » existait en partie ; elle a été complétée.
Les informations et les rapports sur les attaques chimiques françaises et allemandes (front de l’Ouest uniquement) sont inédites.
La partie consacrée aux Services chimiques français dans l'entre-deux guerre et celle sur la campagne de 1940 est absolument inédite (1920-1940)
Je travail toujours à la réactualisation de ce site. L'ensemble des informations que j'ai recueilli y seront publiées ; je diffuserai, en fonction de mon temps ce travail sur le site.
Arnaud Lejaille